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La crise financière aura-t-elle des conséquences sur les cours des matières premières agricoles? La réponse de Michel Portier, directeur d'Agritel

Par Jean Moullart | Publié le 10 Septembre 2011 à 18:23
La crise financière aura-t-elle des conséquences sur les cours des matières premières agricoles? La réponse de Michel Portier, directeur d'Agritel

La crise financière revient sur le devant de la scène, nourrie des difficultés politiques à résorber définitivement la crise des dettes publiques et de la dégradation de l’environnement macroéconomique, notamment aux Etats-Unis. Le mois de septembre est d’ores et déjà le mois de tous les dangers avec son lot de turbulences sur les indices boursiers d’une part (- 8.6 % sur l’Eurostoxx 50(1) entre le 31 août et le 5 septembre) et sur les marchés obligataires d’autre part. Dans ce contexte, quelles peuvent être les conséquences pour les marchés de matières premières agricoles?

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Première hypothèse, les acteurs financiers se tournent vers le secteur des commodities(2) en tant que valeurs refuges et on assiste à une décorrélation entre ces deux compartiments. Cela a été constaté au cours du mois d’août qui a vu le CAC 40 céder plus de 11 % alors que le GSCI ( Goldman Sachs Commodities Index ) ne cédait que 1.7 %. Parmi les cours des matières premières, les produits agricoles ont surperformé durant août à l’image du soja, du maïs et du blé qui progressaient chacun de plus de 10 %. L’explication de cette progression tient dans l‘analyse des fondamentaux avec une situation climatique très pénalisante, notamment sur le maïs aux Etats unis, où la sécheresse du mois de juillet conduit à constater un bilan très tendu sur ce produit.

 

 

Deuxième hypothèse, la crise financière est très violente au point d’impacter la demande, y compris sur des biens de première nécessité tels que les matières premières agricoles. Dans ce contexte on assisterait alors à terme à un repli des cours. Pour mesurer l’ampleur de ce repli il faut estimer l’élasticité prix demande et analyser séparément les 3 débouchés essentiels, que sont l’alimentaire, l’alimentation animale et l’industrie (y compris les biocarburants). Si sur le premier secteur la demande est quasiment incompressible, sur l’alimentation animale et l’industrie l’impact d’une crise mondiale se ferait largement ressentir. Dans le cas du blé, 70 % environ de la consommation est à destination humaine au niveau mondial, 17 % étant pour la filière animale et seulement 3 % pour l’industrie. Il en est tout autrement sur le maïs puisqu’aux Etats-Unis par exemple, premiers producteur mondial, ce sont plus de 40 % qui vont dans la filière biocarburants. Les conséquences d’une crise financière majeure auraient de ce fait un impact beaucoup plus important sur les cours du maïs que sur ceux du blé. Toujours est-il qu’il faut surveiller dans ce contexte l’attitude des fonds sur ce secteur. Cela se mesure par la position ouverte qu’ils détiennent produit par produit. Cela est possible grâce aux données fournies par la CFTC (Commodities Futures Trade Commission). Ainsi on peut constater sur le mois d’août qu’ils ont globalement augmenté leurs positions longues (c.à.d. aux achats) en moyenne de + 35 % sur le maïs, sur le soja de + 300 % alors qu’ils ont réduit ces mêmes positions de 50 % en blé.

 

En conclusion, on peut estimer que sur le mois d’août les fondamentaux ont été directeurs dans la structure d’évolution des cours à la hausse des matières premières agricoles et que les fonds n’ont fait qu’accompagner un mouvement naturel. La réduction de l’offre a été l’élément clé. De là à conclure que la crise financière du mois d’août n’a été qu’un épihénomène, il n’y a qu’un pas. Une crise majeure sur l’économie mondiale conduisant à une récession impacterait cette fois-ci la demande avec pour conséquence immédiate un repli des cours des commodities. La convergence entre baisse des cours des commodities et baisse des marchés actions ou obligataires serait alors un signe probant que nous entrons dans une crise durable. A l’inverse une divergence des cours ne pourrait qu’être momentanée et les arbitragistes trouveraient en cela une bonne occasion pour gérer le risque de leur portefeuille.

 

 

 

 

(1)   Le Dow Jones Eurostoxx 50 (aussi appelé DJ Eurostoxx 50) est un indice boursier au niveau européen. Au même titre que le CAC 40 pour la France, l'Eurostoxx regroupe 50 sociétés selon leur capitalisation boursière au sein de la zone Euro (et non pas au niveau de l'Europe ni de l'Union européenne).

(2)   Une commodité (de l'anglais commodity) est, en économie, un produit standardisé, essentiel et courant, aux qualités parfaitement définies et connues des acheteurs; les producteurs et commercialisateurs de commodités ne peuvent donc se concurrencer que sur le prix de vente. Dans le monde des affaires anglosaxones, le mot commodity est couramment utilisé pour désigner un bien de consommation industriel ou individuel (une matière première) disponible en grande quantité et pouvant provenir de nombreux fournisseurs différents. Des exemples sont le sucre, le courant électrique, les boulons, certaines mémoires, périphériques informatiques etc. Tous répondent à des standards et leur origine a peu d'importance pour l'emploi qu'on en fait.

 

 

 

 

 

A propos d’Agritel :

Agritel est une société de conseil spécialisée dans la gestion du risque de prix dans le secteur agro-alimentaire et agro-industriel, confronté à une volatilité des prix croissante. Agritel apporte les outils, les connaissances et le savoir-faire utilisés depuis plusieurs décennies dans le monde de la finance en matière de gestion des risques et de couverture. Agritel apporte surtout son expertise aux acteurs du monde financier sur les fondamentaux des marchés agricoles. Créée en 2001 par Michel Portier, Agritel décline aujourd’hui son expertise sur trois métiers : la formation, l’information et le conseil. Elle est présente en France et en Ukraine et va ouvrir prochainement un bureau en Chine puis en Amérique du Sud.




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